Temps de parole, parité, ordonnances : le Sénat modifie son règlement

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C’était une proposition du président, Gérard Larcher. Le Sénat, à majorité de droite, a adopté mardi 1er juin une série de modifications de son règlement, sans les voix de la gauche, fermement opposée à la réduction prévue du temps de parole dans l’hémicycle.

La proposition de résolution fait suite à un groupe de travail sur la modernisation des méthodes de travail du Sénat, qui a réuni tous les groupes politiques de décembre 2020 à mars 2021. Elle sera soumise au contrôle du Conseil constitutionnel, comme le prévoit la Constitution, dans l’objectif d’une entrée en vigueur le 1er octobre, pour le début de la prochaine session ordinaire du Parlement.

Le raccourcissement prévu du temps de parole des sénateurs dans la discussion des articles et des amendements sur un texte a cristallisé les oppositions. Il passera de deux minutes et demie à deux minutes, dans l’objectif de « mieux utiliser le temps de séance publique », face à l’inflation législative.

Le président de la commission des lois, François-Noël Buffet (LR), fait valoir que l’Assemblée nationale a « réduit dès 2009 la plupart de ces temps de parole à deux minutes ». Pour le socialiste Eric Kerrouche, cela se fait cependant « au détriment de la qualité de la loi » et « au bénéfice de la majorité » sénatoriale. « Nous allons dans l’affaiblissement du Parlement et des droits de l’opposition », a-t-il affirmé. « La démocratie est intimement liée au temps, sans ce temps, ce sera la dictature de l’instant », a appuyé la présidente du groupe CRCE, à majorité communiste, Eliane Assassi.

Cette réduction du temps d’intervention est plus pénalisante pour les petits groupes, ont souligné les présidents Jean-Claude Requier (RDSE, à majorité radicale) et Guillaume Gontard (écologiste). Elle « poursuit une évolution inéluctable » et « conforte l’importance des débats en commission », a, au contraire, plaidé le centriste Loïc Hervé.

La gauche s’oppose, en outre, à la suppression de la règle du renvoi en fin de « tourniquet » (ordre de passage tournant des intervenants) de l’orateur issu du même groupe que celui du rapporteur, le plus souvent de la majorité. Là aussi, cela « pénalise les groupes minoritaires », a affirmé Claude Malhuret, président du groupe Indépendants, qui a appelé à « garder le fonctionnement actuel, très démocratique ».

Plus globalement, la gauche a déploré le manque d’ambition des modifications proposées, notamment sur le droit de pétition ou la parité. Le texte consacre dans le règlement le dispositif de pétitions en ligne expérimenté depuis janvier 2020, avec un seuil à 100 000 signatures, mais sans automaticité, les instances du Sénat gardant la main sur leur inscription ou non à l’ordre du jour.

Concernant la parité, il prévoit que les groupes politiques « s’efforcent d’assurer une représentation équilibrée entre les femmes et les hommes » dans les listes établies pour l’élection des membres du bureau du Sénat, l’instance-clé de la chambre haute. Une disposition d’« affichage et sans contrainte », a fustigé M. Kerrouche.

L’amélioration du suivi des ordonnances, sujet cher à Gérard Larcher, fait, elle, consensus. « Il est important que le Sénat marque sa volonté de reprendre la main en opérant un contrôle plus étroit de la législation déléguée », a déclaré Pascale Gruny (LR).

Le texte ajoute le suivi des ordonnances aux missions des différentes commissions permanentes du Sénat et renforce son information sur les intentions du gouvernement quant à leur publication et leur ratification. L’objectif est de répondre à l’explosion, ces dernières années, du nombre de textes autorisant le gouvernement à légiférer par ordonnances, lesquelles court-circuitent les débats.

Depuis le début de l’actuelle législature, 298 habilitations à légiférer par ordonnances ont été accordées par le Parlement, dont 90 liées à la crise sanitaire du Covid-19, soit un doublement par rapport au quinquennat 2007-2012, et une augmentation de 23,6 % par rapport à 2012-2017, selon les données du Sénat.

Le texte tend aussi à renforcer les pouvoirs de contrôle du Sénat, en simplifiant notamment la constitution de commissions d’enquête lorsque la chambre ne siège pas.

Source: lemonde.fr

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