Electricité : délestages tournants, trains et métros annulés, écoles fermées… le gouvernement demande aux préfets d’anticiper d’éventuelles coupures

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Le gouvernement va adresser une circulaire aux préfets afin qu’ils puissent anticiper et préparer leurs départements à d’éventuelles coupures programmées de l’électricité, a-t-on appris, mercredi 30 novembre, de source gouvernementale. Cela concerne le territoire métropolitain, à l’exception de la Corse, reliée à l’Italie, et qui dispose de sa propre production électrique.

Le texte sert à « finaliser la préparation du pays », même si des délestages tournants, de deux heures maximum, restent à ce stade une hypothèse, notamment en janvier si l’approvisionnement en électricité vient à poser problème. « On ne couperait que si le froid se confirme, qu’on a un problème de production ou d’interconnexion [avec les pays voisins] et si la consommation ne baisse pas », insiste-t-on de même source.

Dans la pratique, une partie de la population ne sera jamais délestée car prioritaire, ou raccordée par chance à une ligne prioritaire, « ce qui concerne 40 % des gens », selon le gouvernement, ajoutant que les délestages ressembleront aux taches d’une « peau de léopard ». Il n’y aura aucun département délesté en entier, mais seulement des parties minoritaires du territoire. Un foyer pourra être touché à plusieurs reprises et les préfets doivent identifier les 3 800 patients à haut risque dépendants d’un équipement médical à domicile branché sur le secteur pour s’assurer qu’ils disposent d’un générateur personnel ou pour organiser leur transfert dans un centre hospitalier.

Dans tous les cas, les coupures auraient lieu aux moments des pics de consommation, entre 8 heures et 13 heures, et entre 18 heures et 20 heures. Avec comme inconvénient pour les écoles susceptibles d’être délestées, qu’elles soient privées de lumière, chauffage et alarme en matinée. Jeudi, le ministre de l’éducation nationale, Pap NDiaye, a confirmé la fermeture des écoles le matin en cas de coupure d’électricité. « La rentrée des élèves le jour concerné se fera en début d’après-midi, avec sans doute un repas qui sera néanmoins prévu pour les élèves qui sont à la cantine », a-t-il déclaré.

Par ailleurs, « des écoles situées à proximité de structures qui ne subiront pas les délestages » pourront « accueillir les enfants de personnels prioritaires, selon un schéma qui a d’ailleurs été expérimenté pendant la crise sanitaire », a détaillé le ministre. « Il n’y a pas encore de carte de ces délestages, ni bien entendu, y compris pour des raisons de sécurité, des structures prioritaires. Nous allons travailler à tout cela », a-t-il poursuivi.

Pour les voyageurs, certains trains ou métros pourraient être annulés pour éviter d’avoir des passagers bloqués en pleine voie : « Soit ça roule de bout en bout, soit on préférera interrompre deux heures, car être coincé dans le métro deux heures n’est pas une option. »

Un signal EcoWatt rouge serait émis trois jours à l’avance, permettant de connaître un jour avant quels départements seraient concernés, puis de savoir, en bout de chaîne, la veille à 17 heures qui est précisément touché par les coupures en renseignant son adresse sur un site Internet d’Enedis et de Réseau de transport d’électricité (RTE), qui gèrent le réseau français de distribution et de transport de l’électricité.

Selon une autre source proche du dossier, il est demandé aux préfets de présenter des schémas de délestage permettant de réduire à 38 % la consommation dans les zones concernées. La cellule interministérielle de crise travaille sur l’hypothèse que six à dix délestages seront nécessaires sur la période, et des délestages de deux heures touchant six millions de personnes en même temps. La cellule interministérielle de crise travaille aussi à un scénario de black-out mais sans y croire.

Il y a « une situation à risque, mais il ne faut pas considérer ces coupures comme une fatalité », a rassuré le président du directoire de RTE, Xavier Piechaczyk, sur Franceinfo, rappelant la nécessité de baisser la consommation. La consommation d’électricité en France a diminué de 6,7 % la semaine dernière par rapport à la moyenne des années précédentes, une baisse « largement concentrée dans le secteur industriel », selon le dernier bilan de RTE mardi. Cette baisse, « on commence à la voir chez les particuliers, ça frémit (…) de l’ordre du pourcent », a commenté M. Piechaczyk.

La circulaire vient parachever un travail préparatoire déjà effectué par les préfectures pour mettre à l’abri des coupures les sites critiques : casernes de pompiers, gendarmerie, hôpitaux, etc. Quelques sites industriels ont également été placés sur les listes de clients prioritaires, de même que les installations classées disposant de groupes électrogènes qui ont désormais un mois pour en tester leur fonctionnement.

Pour les urgences, il sera recommandé de privilégier le 112. Une cartographie complexe des zones blanches où les antennes téléphoniques relais seraient coupées est en cours de réalisation. La directrice générale d’Orange, Christel Heydemann, a prévenu mercredi que les coupures d’électricité et donc du réseau mobile français cet hiver auraient un impact sur « l’accès aux services de numéro d’urgence ». « Il est illusoire d’imaginer qu’en cas de délestage, on saura maintenir un service continu pour l’ensemble des Français. Les services mobiles, s’ils sont éteints dans une zone géographique pendant deux heures, il n’y aura pas d’accès aux services de numéro d’urgence pendant un temps », a-t-elle déclaré lors d’une audition devant la commission des affaires économiques du Sénat.

« Il y a des systèmes de secours qui permettront de prendre le relais. Néanmoins si les délestages se multiplient, on ne sait pas comment se comportera le réseau », a affirmé Mme Heydemann, ajoutant qu’il « est illusoire d’imaginer mettre des batteries au pied de chacun des sites mobiles en France ». « Il pourrait y avoir des situations où la lumière fonctionne dans un appartement, mais les [réseaux] mobiles ne fonctionnent pas parce que la tour est dans une zone qui est elle-même délestée, et vice-versa », a encore averti la dirigeante d’Orange.

La France est exposée à des risques de coupures, en particulier en raison d’un niveau de production d’électricité nucléaire au plus bas. La moitié de son parc de réacteurs est indisponible à cause de maintenances programmées, mais parfois prolongées, ou de problèmes de corrosion. La crainte de coupures a été ravivée après les dernières prévisions de RTE, le gestionnaire du réseau de haute tension, qui a averti à la mi-novembre d’un risque « élevé » de tensions sur le système électrique en janvier, en raison du redémarrage plus lent que prévu de réacteurs nucléaires d’EDF.

Mise à jour du jeudi 1er décembre à 17 heures : les conséquences des coupures sur les foyers et sur la situation des patients à haut risque dépendants d’un équipement médical à domicile ont été rectifiées.

Source: lemonde.fr

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