Mort de Steve Maia Caniço : le parquet ouvre la voie à un procès en correctionnelle

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C’est une communication dont le moindre mot a été pesé au trébuchet. Et les mots choisis sont sévères. Ce mercredi 30 novembre, le procureur de la République de Rennes, Philippe Astruc, a requis le renvoi de Grégoire Chassaing, commissaire ayant mené l’opération de dispersion d’une soirée techno organisée la nuit de la Fête de la musique de 2019 à Nantes, et de Johann Mougenot, directeur de cabinet du préfet de l’époque, devant le tribunal correctionnel « afin qu’ils soient jugés du chef d’homicide involontaire ». Cette nuit-là, Steve Maia Caniço, 24 ans, s’est noyé dans la Loire, au moment de l’intervention policière.

L’étau judiciaire se resserre autour des deux hommes mis en examen. Le réquisitoire définitif du magistrat rennais pointe « les fautes commises dans la conduite de l’intervention de police » sur le quai Wilson, site alors dépourvu du moindre parapet, et plus spécifiquement « l’usage de grenades lacrymogènes par les forces de l’ordre ». Tout comme il met en exergue « les fautes commises dans le cadre de la préparation de la Fête de la musique », notamment l’absence de mise en place d’un barriérage sur ce domaine, propriété du grand port maritime de Nantes-Saint-Nazaire, établissement public de l’Etat. S’ils n’ont pas directement causé le décès de M. Maia Caniço, ces manquements ont « contribué de manière certaine à sa survenance », analyse M. Astruc.

Point délicat pour la défense : les investigations réalisées dans le cadre de l’information judiciaire ont « établi avec précision et certitude » l’heure de la chute dans la Loire de M. Maia Caniço, soit le 22 juin 2019, à 4 h 33 et 14 secondes, « dans le temps de l’intervention de police et postérieurement aux premiers usages de grenades lacrymogènes ayant eu lieu dès 4 h 31 ».

La note de service des policiers du 20 juin 2019 mentionnait la consigne de n’employer des moyens lacrymogènes qu’en cas de nécessité absolue, « sur instruction expresse du directeur du service d’ordre ». Or, après que les policiers ont essuyé des jets de projectiles, les effectifs placés sous la direction du commissaire ont fait usage de trente-trois grenades lacrymogènes, de dix grenades de désencerclement et, à douze reprises, de lanceurs de balles de défense, sans en référer en amont à la hiérarchie. Une riposte inadéquate, selon M. Astruc, qui rappelle qu’une grenade lacrymogène de type MP7 peut couvrir « une zone allant jusqu’à 1 000 mètres carrés ».

Le commissaire Grégoire Chassaing, jauge-t-il encore, a mis en œuvre « des opérations de progression et d’interpellation, sans prohiber immédiatement l’usage important » de ces armes, alors même que « d’autres solutions étaient possibles, notamment celle d’un repli ». La conclusion est implacable : l’usage de « moyens inappropriés au regard de la situation apparaît constitutif d’une faute caractérisée ayant contribué à la chute en Loire et au décès de Steve Maia Caniço ».

Source: lemonde.fr

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