Les virologues ont-ils pris la rue de la loi ?

Les virologues ont-ils pris la rue de la loi ?

Les scientifiques sont-ils trop présents dans la gestion de la crise ? De plus en plus de voix, au sein du monde politique, s’élèvent pour remettre en question leur omniprésence en particulier dans les médias. Il y a de l’eau dans le gaz. Sentant le vent tourner, les recteurs d’universités en Flandre se fendent d’une lettre ouverte pour les défendre.

Critiques

Les critiques adressées aux experts sont assez variées. Cela concerne par exemple la manière de compter les décès. Une méthode très large qui aurait ruiné l’image de la Belgique à l’étranger. Cela concerne leur catastrophisme dans les médias, ou encore leur manque de clairvoyance au tout début de la crise quand la plupart des experts se montraient rassurants.

Autre reproche, les virologues ne seraient intéressés que par le champ de recherche, le virus. Ils seraient aveugles à toutes les autres dimensions. Cela mettrait en danger l’économie. Enfin ils seraient trop visibles, pas assez humbles, ils prendraient trop de place, trop de pouvoir.

Il est vrai que dans les médias français, britanniques, ou américains, vous voyez moins de virologues et plus de politiques à la manœuvre. En France par exemple c’est le ministre de la santé qui tient le décompte quotidien des cas.

Les recteurs au front…

Ces critiques deviennent tellement fortes que les recteurs des universités flamandes se sont mis ensemble pour défendre les scientifiques. Ils défendent leur droit à l’erreur. La vérité scientifique n’est pas absolue, elle progresse. La science, surtout en médecine, s’intéresse à l’incertain, les connaissances évoluent. Il y a des revers, des hypothèses sont avancées, parfois révisées. Cela ne doit pas nous faire perdre confiance dans les procédures et la rationalité scientifique.

Un autre problème soulevé par les recteurs est de considérer les virologues comme étant seulement intéressé par le virus et totalement détaché des autres contingences. Croire que le politique serait le seul à prendre en compte la globalité des éléments, en particulier l’économie est erroné disent les plus hautes autorités académiques flamandes. Cela conduit à un faux dilemme choisir entre la virologie et l’économie.

Virologie vs Economie

Ecouter les virologues, ne nuit pas à l’économie. C’est leur message. C’est aussi le point de vue défendu récemment par un Economiste du MIT, Emile Verner. Il a observé que lors de la Pandémie de grippe Espagnole de 1918, la production nationale industrielle a diminué aux à États-Unis de 18%. Mais les villes qui ont appliqué les indications scientifiques en imposant des restrictions plus tôt et plus longtemps ont eu non seulement moins de morts, mais aussi de bien meilleurs résultats économiques dans l’année qui a suivi l’épidémie.

Prenons un autre exemple, c’est un raisonnement scientifique qui à conduit à comptabiliser très largement le nombre de décès dû au virus chez nous. Cela nous a valu une très mauvaise image à l’étranger, celui pays au nombre record de décès par habitant. Nous avons été publiquement raillés par Donald Trump qui a présenté un tableau peu flatteur.

Mais dans le New York Times, un autre classement a été publié. Il compare la surmortalité dans plusieurs pays par rapport à la normale et les calculs officiels des décès Covid-19. La Belgique est avec la Suède le pays le plus proche de la réalité. La Belgique est l’un des pays qui pourra dire, nous ne vous avons pas menti, ou caché la vérité.

Je crois aussi que le politique doit faire son grand retour, à la faveur de cette crise. Les experts ne doivent absolument pas décider à la place des élus et bien sûr tous les scientifiques ne se valent pas et ne sont pas irréprochables. Mais la forte présence des scientifiques dans la gestion de la crise et dans les médias ne discrédite pas le politique. C’est même le contraire. A long terme, les experts et les scientifiques créent de la confiance dans les institutions. Ils créent les conditions d’un débat politique cadré par la rationalité. Au travers des médias, ils permettent aux citoyens de pouvoir construire leurs opinions sur des faits solidement étayés. C’est la clef pour que nos démocraties s’en sortent par le haut.

 

 

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Source: rtbf.be
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