En Syrie, le troisième opérateur de téléphonie mobile sous contrôle des Gardiens de la révolution iraniens

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Le président Bachar Al-Assad ne fait pas mystère de son intention de faire main basse sur le secteur des télécommunications en Syrie. L’octroi, en février, d’une licence à la société Wafa Telecom comme troisième opérateur de téléphonie mobile du pays a conforté sa mainmise sur ce secteur lucratif, après la reprise en main des deux autres opérateurs, Syriatel et MTN Syria. L’Etat et des hommes d’affaires syriens liés au clan Assad figurent au nombre des actionnaires, dont le désormais incontournable Yasser Ibrahim, conseiller économique du président et homme-clé de l’empire que ce dernier s’est bâti avec son épouse, Asma.

Le secret était en revanche bien gardé sur l’actionnaire majoritaire. A dessein. Une enquête menée par l’Organized Crime and Corruption Reporting Project (OCCRP) et l’Observatory of Political and Economic Networks (OPEN), publiée vendredi 9 décembre, révèle que, derrière un montage financier opaque, se cache une société malaisienne liée aux gardiens de la révolution iraniens, le bras armé de la République islamique.

Ce partenariat avec le pouvoir syrien constitue un « retour sur investissement » attendu par l’Iran en contrepartie du soutien qu’il a apporté au régime Assad dans la guerre civile. Depuis le déclenchement du conflit en mars 2011, Téhéran a financé les milices chiites qui ont combattu dans les rangs loyalistes et soutenu l’économie du pays, notamment par l’importation à crédit de pétrole. En mai 2020, le député iranien Heshmatollah Falahatpisheh estimait que l’Iran avait aidé la Syrie à hauteur de 20 milliards à 30 milliards de dollars. Le commerce bilatéral est pourtant resté à un niveau symbolique, entravé par les sanctions occidentales. L’Iran s’est vu ravir de nombreux projets par la Russie, dont le soutien diplomatique et militaire a été décisif au maintien du régime Assad.

L’entrée dans ce secteur de premier plan, par ailleurs stratégique en matière de surveillance, conforte donc les ambitions de Téhéran en Syrie. Les télécommunications restent rentables malgré le déclin économique entraîné par la guerre, les coupures fréquentes d’électricité, et la destruction de près de 60 % des infrastructures. En 2021, le profit cumulé par les actionnaires de MTN Syria et Syriatel s’est élevé à 46 millions de dollars, après qu’ils ont versé à l’Etat sa part, près de 38 millions de dollars. « Cela représente 3 % des revenus de l’Etat, ce qui n’est pas négligeable », souligne l’économiste Jihad Yazigi, rédacteur en chef de la lettre économique en ligne Syria Report. Des conditions très favorables ont été accordées au nouvel opérateur pour se faire une place face au duopole qui domine ce marché de 12 millions d’usagers depuis 2001 : Wafa Telecom a obtenu un monopole de trois ans pour déployer le réseau 5G et l’autorisation d’offrir un forfait à moitié prix à ses trois premiers millions d’utilisateurs.

Source: lemonde.fr

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