« Tu étais habillée comment ? », une expo démonte les préjugés sur le viol et libère la parole

L'exposition "Tu étais habillée comment?" présente vêtements et témoignages de femmes victimes
L’exposition « Tu étais habillée comment? » présente vêtements et témoignages de femmes victimes — J. Urbach
  • Adaptée d’une initiative américaine, l’exposition Tu étais habillée comment ? a été inaugurée ce jeudi en présence d’une centaine d’élèves nantais, à la préfecture de Loire-Atlantique.
  • En tentant de déconstruire le lien parfois fait entre tenue vestimentaire et agression sexuelle, elle a aussi le mérite de libérer la parole chez les adolescentes qui ont toutes quelque chose à raconter sur le sujet.

Une robe à fleurs toute simple. Un débardeur noir et un jean. Une veste marron. Voilà la tenue que ces Nantaises victimes de viol portaient au moment où leur vie a basculé. Depuis ce jeudi et pour quelques jours à la préfecture de Loire-Atlantique, ces vêtements sont présentés associés à leurs témoignages, anonymes, dans le cadre de l’exposition itinérante Tu étais habillée comment ?. « C’est une adaptation d’une initiative née aux Etats-Unis, détaille Isabelle Hérigault, présidente de l’association Question confiance. Elle vise à dénoncer le fait que dans l’imaginaire collectif, on pense encore que les femmes violées l’ont parfois bien cherché, en raison d’attitudes provocantes. »

Devant un legging noir et un t-shirt de fillette accrochés à une grille, deux lycéennes parmi la centaine d’élèves invités à l’inauguration de l’expo discutent. « Ça fait vraiment de la peine de se dire que même une petite fille de 5 ans peut vivre ça, à l’école », confie Oumraziat, 16 ans. Déjà convaincue que « les vêtements n’ont aucun rapport avec le fait de se faire agresser ou non », la jeune femme admet pourtant que le sujet n’est pas si simple. « Il y a toujours le regard des gens qui pèse sur nous, qui nous influence un peu, poursuit-elle. Si tu t’habilles trop court, tu es vue comme provocatrice. Si tu es trop couverte, tu es une coincée. »

« Un jogging par-dessus ma tenue de soirée »

Un peu plus loin, à côté d’un épais manteau noir et de bottines en daim, un petit texte écrit à la première personne raconte comment « une banale soirée entre copines a viré au drame ». Un trajet toute seule à pied, un garçon « insistant », puis « le trou noir », suivi des « séquelles physiques ». Un témoignage qui fait lui aussi écho chez les adolescentes, qui ont toutes quelque chose à raconter. « Un mec m’a suivie en m’insultant pendant une heure dans la rue, jusqu’en bas de chez ma copine, raconte Hari, élève de terminale, encore très mal à l’aise. J’ai pleuré, j’ai eu super peur. » La jeune femme, vêtue d’un large sweat à capuche, avoue avoir développé une surprenante habitude. « Quand je vais en soirée, je mets un jogging par-dessus ma tenue, et je l’enlève une fois sur place. On se camoufle, c’est comme ça. » « Elles se cachent pour se protéger du regard des hommes », déplore Isabelle Hérigault.

A l’école, en promenade, dans le métro… L’exposition vise aussi à montrer que les agressions peuvent malheureusement se dérouler partout, et notamment au sein de la famille. Pour preuve, 43 % des femmes sont victimes d’actes sexistes dans leur foyer, a rappelé le préfet Didier Martin, à la veille de la journée internationale de lutte contre les violences faites aux femmes. Si l’exposition met en lumière le parcours d’une femme qui a été « considérée comme un objet » par son conjoint, lequel l’obligeait notamment à porter des tenues très féminines (comme les sandales dorées à hauts talons exposées), les réflexions et comportements peuvent venir d’autres membres de la famille. « Mon oncle de 70 ans m’a regardé un jour en me disant :  » Oh la la, si j’avais 20 ans de moins… « , confie une lycéenne. Je n’ai même pas compris sur le coup. Depuis, je ne me sens pas en sécurité en sa présence… »

Source: 20minutes.fr
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