Rentrée des classes 2022 : Comment le gouvernement veut-il réformer le lycée professionnel ?

A Paris, un atelier au lycée professionnel Chenneviere Malezieux, le 10 Decembre 2021.
A Paris, un atelier au lycée professionnel Chenneviere Malezieux, le 10 Decembre 2021. — NICOLAS MESSYASZ/SIPA
  • Le gouvernement veut transformer en profondeur la voie professionnelle en la rapprochant du monde du travail et ce, dans les cinq ans qui viennent.
  • Devant les recteurs la semaine dernière, Emmanuel Macron a ainsi rappelé son souhait d’augmenter « les temps de stage d’au moins 50 % ».
  • Un projet qui fait grincer des dents les syndicats. Et ce n’est pas le seul…

« La voie professionnelle ne doit pas être une voie par défaut, mais une voie de choix », déclarait Emmanuel Macron la semaine dernière devant les recteurs. Et le nouveau quinquennat sera l’occasion d’une « transformation profonde » du lycée professionnel, a indiqué le chef de l’Etat.

Pour justifier cette réforme, il s’appuie sur des chiffres. « Les lycées pro comptent deux tiers des décrocheurs », a indiqué le président, avant de mentionner d’autres données inquiétantes concernant les conditions d’insertion des élèves : « 41 % des titulaires d’un CAP ont un emploi deux ans après l’obtention de leur diplôme, 53 % pour les bacs pro. » L’objectif sera de « ré-arrimer très en profondeur et en amont le lycée professionnel avec le monde du travail », a précisé le chef de l’Etat. Pour souligner cette ambition, dès cette rentrée, les lycées professionnels sont placés sous la double tutelle du ministère de l’Education et de celui du Travail.

Revoir la carte des formations, une nécessité pour le gouvernement

Premier chantier : réviser la carte des formations afin qu’elles soient plus en phase avec le marché de l’emploi. Une mission qui sera confiée aux recteurs en lien avec les régions. « Il faudra assumer ensemble de fermer celles qui ne fonctionnent pas et développer celles qui marchent. Et en créer de nouvelles sur les métiers qui recrutent », a insisté Emmanuel Macron. Une perspective que redoute Sigrid Gerardin, secrétaire générale du Snuep-FSU, le syndicat de l’enseignement professionnel : « Le gouvernement va calibrer les filières professionnelles en direction des métiers qui peinent à recruter et que les gens désertent en raison de leurs conditions de travail défavorables ». Selon elle, il serait nécessaire d’insister « sur les filières industrielles, sur les métiers de la transition énergétique et de la dépendance ».

Autre volonté d’Emmanuel Macron : « recruter davantage de professeurs associés issus du monde professionnel ». Mais là aussi, Sigrid Gerardin exprime ses doutes : « Ce n’est pas parce qu’on est un bon mécanicien qu’on est un bon prof de mécanique. L’enseignement, ça s’apprend », affirme-t-elle.

L’augmentation des temps de stages, un sujet qui divise

Le point qui fait le plus polémique concerne les stages. « Dès la rentrée 2023, les temps de stages seront augmentés de 50 % », a déclaré Carole Grandjean, la nouvelle ministre déléguée à l’Enseignement et à la Formation professionnels lors de la conférence de presse de la rentrée. Sachant qu’à ce jour, 22 semaines sont déjà prévues sur les trois ans de bac pro, et de 12 à 14 semaines pour les deux ans de CAP. Une mesure que les syndicats critiquent déjà. « Si on augmente le temps de stages, on va diminuer le temps de présence à l’école. Ça veut dire moins d’enseignement général et moins de culture citoyenne. Ça va obérer les chances des élèves de réussir leurs examens, sachant que le lycée pro enregistre déjà les moins bons résultats », estime Sigrid Gerardin. Pour Laurent Lapayre, délégué national de la voie professionnelle au Se-Unsa, le projet du gouvernement aboutirait à « moins de cours théoriques pour des élèves ayant pourtant besoin de temps pour assimiler des savoirs professionnels et des connaissances ». Ce qui selon lui risquerait de « fragiliser la poursuite d’études post-bac ».

D’autant que sous le quinquennat précédent, les programmes avaient déjà été revus, rappellent les syndicats : « Avec la réforme Blanquer de 2018, ils ont déjà perdu entre 3 et 4 heures par semaine, notamment en enseignement général », indique Axel Benoist cosecrétaire du Snuep-FSU.

Susciter des vocations chez les élèves, un impératif

Le gouvernement veut aussi mieux rémunérer les périodes de stage. Car aujourd’hui, les élèves ne sont rémunérés qu’au bout du 44e jour et très faiblement. « L’écart qu’il y a entre les stages que nous connaissons en lycée pro et ce que touche un apprenti n’est pas soutenable, on va devoir aller vers une convergence », a insisté Emmanuel Macron. Selon les premières pistes évoquées, la rémunération pourrait se situer autour de 200 euros par mois pour un mineur et de 500 euros par mois pour un majeur. « Cette gratification sera financée par l’Etat », a précisé Carole Grandjean.

Mais tous ces dispositifs ne sont pas encore actés et vont être discutés dans les prochains mois avec la communauté éducative. « Dès cette rentrée 2022, je lancerai avec l’ensemble des acteurs les échanges sur la réforme du lycée professionnel », a annoncé la ministre. Grâce à ces changements à venir, le gouvernement espère susciter des vocations chez les élèves. Car la voie professionnelle est en perte de vitesse ces dernières années, alors que les entreprises de certains secteurs peinent à recruter, faute de candidats. Le gouvernement compte aussi sur la demi-journée hebdomadaire de découverte du monde du travail (visites d’entreprises, rencontres avec des professionnels, mini stages…) qui va être instaurée en 5e dès cette année. Et qui elle aussi suscite des critiques…

Source: 20minutes.fr
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