Pour Catherine Frot, le film « Sous les étoiles de Paris » représente ‘l’idée du partage »

La comédienne Catherine Frot lors du Festival international du film policier de Beaune, le 4 avril 2018 (photo d'illustration).
La comédienne Catherine Frot lors du Festival international du film policier de Beaune, le 4 avril 2018 (photo d’illustration). (FRANCK CASTEL / MAXPPP)

Le filmSous les étoiles de Paris, c’est l’histoire d’une sans-abri, Christine, à la rue depuis de nombreuses années et logée sous un pont, seule. Suli, un garçonnet de 8 ans, fait irruption dans son antre par une nuit d’hiver. Il ne parle pas français, est perdu et recherche sa mère. Unissant leurs deux solitudes, ils partent en quête de celle-ci. De cette rencontre, Christine retrouve cette humanité qu’elle pensait avoir perdue.

Catherine Frot nous surprend encore une fois, en se glissant dans la peau d’une SDF. Elle raconte au micro d’Élodie Suigo que c’est en regardant le documentaire Au bord du monde (2014)du même réalisateur qu’elle craque complètement et souhaite le féliciter de ce qu’elle a pu y découvrir. Un lien se crée et comme une petite musique dans sa tête, elle imagine adapter les textes pour le théâtre mais Claus Drexel voit plus loin et un film avec elle : « Son documentaire était vraiment remarquable avec des témoignages extraordinaires de gens de la rue, dehors, l’hiver, sous la neige à Paris. Il y a eu un an et demi d’écriture donc c’est son film, mais c’était ma volonté aussi ».

« Christine est presque morte intérieurement » 

Pour interpréter pleinement son personnage à la marge, elle s’immerge dans le monde de la rue. Elle se rend par exemple à l’église de Saint-Leu, dans le 2e arrondissement de Paris, à la distribution de petits-déjeuners le samedi matin, rencontrant ces hommes qui, dans le film, jouent leurs propres rôles. « Et franchement, c’était hyper-émouvant », explique-t-elle. 

Pour créer son personnage, elle se replonge dans les gravures anciennes de Daumier, celles des vieux livres des frères Grimm « où on voit des femmes qui ressemblent un peu à des sorcières ».  Elle revoit le Kid de Charlie Chaplin ou encore revisite certains poèmes de Victor Hugo ou de Charles Baudelaire. Catherine Frot garde la tête haute pour cette femme tellement désociabilisée que sa voix en est rauque et étouffée. « Elle est presque morte intérieurement« , décrit la comédienne.

Ce conte des temps modernes commence par cette rencontre improbable qui nous projette aussi dans une réalité dramatique bien contemporaine, le sort des migrants : « Elle regarde son visage avec une allumette, c’est une petite référence à ‘La petite fille aux allumettes’ d’Andersen et donc la dignité c’est aussi cette façon de raconter. C’est l’envie que quelque chose s’élève en fait. » Ce film représente pour elle un essentiel : « L’idée du partage. » « Ce sont les pauvres qui aident les pauvres, ce qui est souvent vrai au quotidien. »

 « Les mots parfois sont exceptionnels »

Avec le personnage de Christine, Catherine Frot a en commun le goût des livres. La première les glane dans les poubelles, la seconde les découvre très jeune avant de se diriger vers le théâtre et les grands auteurs : « Les mots parfois sont exceptionnels. » Un choix qui détonne avec le profil de ses parents exerçant plutôt dans les domaines de l’ingénierie et des mathématiques : « Je me suis dit : mon père est tellement scientifique, ma mère aussi, que quelque part, choisir l’inverse, c’est logique aussi. » Pas de psychorigidité dans la famille, elle grandit au rythme du grand écran avec les films de Charlie Chaplin, Buster Keaton ou de Jacques Tati grâce à son père : « Entre 8 et 15 ans, on les a tous vus, ça laisse des traces. »

Donner à entendre et à voir aux gens, c’est tout un apprentissage. Celui de faire ressentir, d’émouvoir, de charmer, de faire peur, de déranger éventuellement, et tout ça, j’ai appris à le faire

Catherine Frot

à franceinfo

Quelques décennies plus tard, de nombreux films et pièces de théâtre et des récompenses à son actif, Catherine Frot est heureuse de son parcours. Avec une notoriété arrivée tardivement, seulement dérangeante sur le plan personnel. « Familialement, ce n’est pas fastoche », dit-elle. Cette grande actrice qui se destinait au registre plutôt comique n’a donc pas fini de nous en mettre plein les mirettes : « J’ai des os à ronger. Pendant quinze ans, j’avais l’impression d’en n’avoir vraiment pas beaucoup et c’est vrai que là, l’os à ronger, il est important, il y a encore ce qu’il faut dessus. »

Source: francetvinfo.fr
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