Emmanuel Macron annonce le lancement d’une stratégie nationale de lutte contre l’endométriose… sans calendrier ni budget précis

Illustration d'une femme avec des douleurs au ventre. L'endométriose est une maladie qui provoque d'intenses douleurs pendant les règles et est la première cause d'infertilité en France.
Illustration d’une femme avec des douleurs au ventre. L’endométriose est une maladie qui provoque d’intenses douleurs pendant les règles et est la première cause d’infertilité en France. — Pixabay
  • Un premier pas important est franchi avec l’annonce, ce mardi, d’une stratégie nationale de lutte contre l’endométriose.
  • Emmanuel Macron vient de lancer ce plan, qui vise à mieux faire connaître cette maladie répandue mais méconnue, handicapante et première cause d’infertilité en France. La stratégie se base sur trois objectifs ambitieux en matière de recherche, d’accessibilité aux soins et d’information et de formation.
  • Mais à bien y regarder, le gouvernement voulait s’attaquer à cette maladie dès mars 2019. Et l’Elysée ne prévoit, pour le moment, aucun moyen financier.

Briser l’omerta. Emmanuel Macron annonce ce mardi, via une vidéo postée sur les réseaux sociaux, le lancement d’une stratégie nationale de lutte contre l’
endométriose. Une maladie « qu’il faut sortir du silence », selon les mots de
l’Elysée. Cette pathologie gynécologique, qui provoque des douleurs plus ou moins intenses pendant les règles, toucherait une femme sur dix, soit plus de 2 millions de Françaises, et représente 
la première cause d’infertilité.

Depuis quelques années, les médias ont fait sortir de l’ombre cette maladie longtemps méconnue, autant du grand public que des soignants. La France passe donc la seconde avec une stratégie spécifique. Ce mardi matin,
Chrysoula Zacharopoulou, députée européenne (LREM) et gynécologue de formation, a remis son rapport – « proposition d’une stratégie nationale contre l’endométriose » – , commandé par Olivier Véran en mars 2021, au président. Lequel n’a pas perdu de temps. En choisissant d’annoncer lui-même – et le jour même – le lancement de la stratégie, Emmanuel Macron veut montrer qu’il prend au sérieux cet aspect de la santé des femmes.

Trois priorités : recherche, accès aux soins et information

Comment va se décliner cette stratégie ? « Le président considère qu’il y a trois enjeux majeurs, précise l’Elysée. Tout d’abord, parvenir à une meilleure connaissance des causes de la maladie, des traitements, des prises en charge. » C’est le volet recherche, encore balbutiante en la matière. Pour cela, les équipes pourront s’appuyer sur six cohortes de patientes déjà constituées. Pour voir si des facteurs génétiques, l’hygiène de vie ou d’autres facteurs peuvent intervenir dans la maladie. Et comment soulager les douleurs, qui peuvent clouer au lit certaines femmes pendant leurs règles.

Deuxième axe : l’accessibilité et la qualité des soins. « De sorte qu’en tout point du territoire soit identifiées des filières de traitement », insiste l’Elysée. Qui reconnaît que les femmes ne sont pas soignées de la même façon partout. D’autant qu’avec le manque de généralistes et de gynécologues, deux professions en première ligne pour repérer et traiter l’endométriose, la question est essentielle.

« Il faut nous appuyer sur les associations, les médecins spécialisés, afin que dans chaque région, il y ait au moins un centre de recours et d’expertise sur l’endométriose, reprend l’entourage d’Emmanuel Macron. En moyenne, il peut se passer aujourd’hui sept ans entre la déclaration des symptômes et le diagnostic. » Les Agences régionales de santé (ARS) vont lancer des appels à projet.

Troisième enjeu : sensibiliser, aussi bien le grand public que les soignants. « Car cette maladie est invalidante sur le plan des douleurs, de l’infertilité, liste l’Elysée. En parler, c’est s’assurer d’une plus grande diffusion médicale des traitements. »

La formation des internes, des sages-femmes, la formation continue des médecins en poste prendra donc en compte cette nouvelle priorité. « La douleur se manifeste au collège, au lycée, à l’université, au travail. Le rapport insiste beaucoup sur le caractère interministériel de la réponse. » Seront réunis autour de la table les ministères de la Santé, de l’Education nationale, de l’Enseignement supérieur, du Travail, de l’Egalité entre femmes et hommes…. Le rapport propose un certain nombre de mesures sur l’information, la formation des médecins du travail, qui pourraient prescrire certains antalgiques. Les sages-femmes devraient également jouer un rôle important.

Quel calendrier et quels moyens ?

Pour réaliser ces objectifs ambitieux, la première étape sera l’installation d’un comité national de pilotage. Il devrait réunir des représentants des nombreux ministères impliqués, sous la houlette du ministère de la Santé, des associations de patientes, des professionnels de santé… Le but : « bâtir un programme national de recherche et travailler sur le cahier des charges pour sortir les appels à projet rapidement pour les ARS ».

Problème : ce comité ne pourra se réunir qu’en présentiel, indique l’Elysée, « dès que la crise sanitaire le permettra », donc. Autant dire pas tout de suite… Or, ces annonces peuvent sembler un peu tardives, seulement trois mois avant l’élection présidentielle. Dès mars 2019, Agnès Buzyn avant annoncé un plan de lutte contre l’endométriose. Avec pour principale annonce la mise en place de filières de prise en charge dédiées « dès 2019 », là encore. Le Covid-19 a retardé cet objectif. Mais des régions et des professionnels de santé n’ont pas attendu pour organiser un réseau sur l’endométriose, notamment en Auvergne-Rhône-Alpes.

Deuxième question encore en suspens : l’Elysée n’a annoncé aucun budget pour cette stratégie nationale contre l’endométriose. « Donner un financement national maintenant, cela risquerait d’être trop bas, argumente l’entourage du président. Le programme de recherche n’existe pas, c’est dire d’où l’on part ! C’est en le bâtissant, comme on l’a fait pour tous les autres, qu’on pourra évaluer les besoins financiers. »

Pour rappel, quand Emmanuel Macron avait annoncé en février 2021 la stratégie nationale décennale (2021-2030) de lutte contre les cancers, elle était financée à hauteur de 1,74 milliard d’euros sur 2021-2025.

Troisième point qui pourrait décevoir les patientes : la non-reconnaissance de l’endométriose comme ALD 30, soit les 30 affections de longue durée qui sont totalement remboursées pour toutes les patientes). Aujourd’hui, elle peut être reconnue comme ALD 31, c’est-à-dire « hors liste » des 30. Cela vaut uniquement pour les patientes les plus affectées dans leur vie quotidienne, c’est-à-dire quand l’endométriose nécessite un traitement de plus de six mois avec des médicaments particulièrement coûteux.

« Dans le cadre de la stratégie, le passage de l’ALD 31 à l’ALD 30 a été posé, argumente l’Elysée. La Haute Autorité de santé, consultée, a conclu que les critères ne sont pas réunis. On reste donc sur une ALD 31, au cas par cas. Mais on ne dit pas que le dispositif fonctionne parfaitement, car il est méconnu par les patientes et les soignants. Il faudrait donc faciliter la reconnaissance en ALD 31. »

Source: 20minutes.fr
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