Coronavirus : Report à octobre, recours judiciaires… Les municipales de plus en plus embourbées

Un bureau de vote à Strasbourg, pour le premier tour des municipales, le 15 mars 2020.
Un bureau de vote à Strasbourg, pour le premier tour des municipales, le 15 mars 2020. — FREDERICK FLORIN / AFP
  • Après avoir décidé de reporter le second tour des municipales en pleine crise du coronavirus, le gouvernement se retrouve face à un calendrier électoral encombré.
  • Si le second tour est reporté à l’automne, il faudrait alors décaler les élections sénatoriales prévues en septembre, et refaire aussi le premier pour les 5.000 communes concernées.
  • Mais de plus en plus de candidats déposent des recours en justice pour faire annuler les résultats du 15 mars, arguant qu’ils sont faussés par le contexte épidémique.

Le scrutin municipal, victime collatérale du Covid-19 ? En pleine épidémie de coronavirus, le sort de l’élection semble de plus en plus incertain. Le gouvernement envisage de reporter le second tour, non plus au mois de juin, mais à celui d’octobre, a annoncé Edouard Philippe jeudi. Quant au premier tour, des candidats tentent de le faire annuler par voie judiciaire. Ils plaident que l’épidémie a biaisé les résultats du vote, alors que l’abstention a atteint un record historique, au-dessus de 55%.

Après avoir fixé l’objectif d’un second tour reporté au 21 juin, le Premier ministre a élargi le calendrier. « Si on fait le constat, en mai, qu’en juin il n’est pas possible d’organiser le deuxième tour », l’élection devra être décalée « peut-être en octobre, peut-être après ».

Le casse-tête pour trouver une date de report

Cette perspective semble faire consensus dans la classe politique, tant l’incertitude demeure sur la date de fin du confinement et les modalités du déconfinement, qui pourrait varier en fonction des régions ou des tranches d’âge, empêchant la tenue du scrutin dans de bonnes conditions sur tout le territoire. Si un report à l’automne était acté par l’exécutif, il faudra une loi et un vote au Parlement « pour organiser les choses », a prévenu Edouard Philippe. Pour les 4.816 communes où le conseil municipal n’a pas été élu au complet le 15 mars, il faudrait alors refaire le premier tour.

Mais trouver une nouvelle date relève du casse-tête, tant le calendrier électoral est encombré. La moitié des sièges de sénateurs doit être renouvelée en septembre, par les élus locaux. Il faudrait donc que le scrutin municipal soit reporté avant, ou que les sénatoriales soit décalées (cela avait été le cas en 2007).

Une autre solution consisterait à regrouper les deux tours des municipales avec les élections régionales et départementales en mars 2021. Mais cette piste ne fait pas l’unanimité car l’organisation de trois scrutins concomitants représente un gros défi logistique et ce triple vote aurait un enjeu politique crucial, à un an de l’élection présidentielle.

Des recours pour annuler les résultats du 15 mars

La question du report est loin d’être le seul boulet pour le gouvernement. Au premier tour, environ 30.000 maires ont été élus dès le 15 mars, ayant passé le seuil des 50 % de suffrages exprimés. Mais plusieurs candidats et élus locaux ont déposé des recours judiciaires pour demander l’annulation des résultats. C’est le cas de Renaud George, maire LREM sortant du village de Saint-Germain-au-Mont-d’Or dans le Rhône.

« J’ai déposé un dossier de 150 pages au tribunal le 20 mars, pour demander l’annulation du scrutin car les règles du jeu démocratique ont été bafouées », explique-t-il à 20 Minutes. L’édile a été battu au premier tour,
à 76 voix près et alors que 60 % des électeurs se sont abstenus. « Ce premier tour a été un simulacre. On a empêché les gens d’aller voter, on leur a volé cette élection », s’indigne-t-il. « La veille du vote, le gouvernement fait fermer les lieux publics et commerces, hormis ceux jugés essentiels, et l’avant-veille il dit aux personnes âgées de rester chez elles ». Il appuie son recours judiciaire sur des témoignages d’électeurs s’étant abstenus par peur d’être contaminés.

Un délai rallongé pour les recours en justice

Renaud George dit avoir été en contact avec « environ 70 autres maires » qui comptent déposer un recours, et un collectif d’élus locaux est en train d’être mis en place. L’édile va « mettre à la disposition d’autres maires » son dossier de recours en contentieux électoral, pour les « aider à faire une action en justice ». En temps normal, tout citoyen peut contester une élection dans les cinq jours suivant le scrutin, mais ce délai a été rallongé par ordonnance, le 25 mars, dans le contexte de la crise sanitaire. Les recours pour le scrutin du 15 mars pourront être déposés jusqu’à cinq jours après « la date de prise de fonction des conseillers municipaux et communautaires élus dès ce tour ». Or cette date n’a pas été encore fixée, en attendant le décret les recours en justice peuvent donc se multiplier.

Dans tout le pays, des recours ont déjà été déposés dans les tribunaux administratifs, par exemple pour les communes de Templeuve-en-Pévèle (Nord), Lumbres et Longuenesse (Pas-de-Calais), d’après La Voix du Nord, et 16 communes de l’Aude selon L’Indépendant. Contacté ce vendredi par 20 Minutes, le ministère de l’Intérieur dit ne pas avoir d’information à communiquer. Le Conseil d’Etat, tutelle des tribunaux administratifs, n’était pas non plus en mesure de communiquer de chiffres sur les recours à ce stade.

Le collectif de maires prépare aussi un recours auprès du Conseil d’Etat et une question prioritaire de constitutionnalité (QPC), selon Renaud George. Si cette QPC est jugée recevable, elle pourrait amener le Conseil constitutionnel à se prononcer sur le scrutin. Sur change.org, Yves d’Amécourt, maire de Sauveterre-de-Guyenne (Gironde), a lancé une pétition pour annuler le premier tour. Elle comptait près de 10.000 signatures ce vendredi.

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Source: 20minutes.fr
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