Radiothérapie : atténuer les peurs par la réalité virtuelle

La clinique H. Hartmann à Levallois-Perret, spécialisée dans le traitement des cancers, s’est équipée d’un dispositif immersif simulant la salle de radiothérapie et le robot auquel aurait affaire le patient. L’enjeu est de diminuer les appréhensions de ce dernier.

Projet VORTHEx

Le projet VORTHEx, développé par Dassault Systèmes, dans une salle dédiée à la clinique H. Hartmann.

Dassault Systèmes

La machine est massive, son gros bras articulé à six degrés de mouvement, impressionnant. Le Cyberknife, c’est son nom, est un robot de radiochirurgie conçu par une société californienne, capable de tourner autour du patient pour mieux cibler les organes cibles et amoindrir la dose de rayons X reçue par les organes à risques. Mais parce qu’être confronté à un tel engin peut vite générer stress et malaise, s’ajoutant à l’angoisse de la maladie elle-même, la clinique H. Hartmann, à Levallois-Perret, autorise ses patients à l’observer sous toutes ses cutures, et même à aller voir les techniciens dans la salle de contrôle au bout d’un petit couloir… du moins en réalité virtuelle.

Avec Dassault Systèmes, l’établissement spécialiste de radiothérapie et radiochirurgie a en effet mis en service fin avril 2022 une expérience immersive inédite dans le monde. Baptisée projet VORTHEx, elle consiste à permettre au patient de se familiariser avec le dispositif qui va le traiter au travers d’un casque de réalité virtuelle HP et d’un pointeur pour se déplacer dans l’espace simulé.

Agir contre un temps de peur

« Modéliser le traitement du patient implique un temps d’attente pour ce dernier, or c’est un temps de peur, explique Alain Toledano, oncologue et radiothérapeuthe à la clinique. Les gens veulent être traités tout de suite. Un robot de radiothérapie peut faire plus peur que de la chimiothérapie. Pour certains, la notion même de robotisation est synonyme de déshumanisation. Il nous fallait diminuer cette peur. »

Quelque temps avant son traitement, le patient vient donc à la clinique coiffer le casque de réalité virtuelle dans une salle dédiée au projet. Il découvre le dispositif de soin tel qu’il le verra en vrai. Et tel qu’il le subira, en s’allongeant pour de vrai sur une banquette pour voir le Cyberknife virtuellement s’approcher de lui.

Non seulement l’expérience simule la machine, mais elle simule son environnement. Tout a été modélisé avec précision, de la texture des matériaux à la configuration des lieux en passant, évident, par tous les équipements techniques. Le robot, la barre de synchonie qui détecte les mouvements du patient, la table où ce dernier s’allonge, les voyants signalant l’émission de rayons en cours, le plafond décoré d’une image de ciel bleu et de palmier, etc.

Restituer l’ambiance sonore

« Nous avons pris un grand soin à restituer l’ambiance sonore, ajoute Frédéric Vacher, directeur du 3D Expérience Lab de Dassault System qui a développé cette immersion. Le robot fait du bruit parce qu’il bouge ou parce qu’ils se charge et cela peut effrayer. Si le patient entend d’abord ces bruits en réalité virtuelle, il trouvera moins bizarre de les réentendre en vrai. »

Même la salle de contrôle, donc, a été reconstituée. Le patient, à l’aide des pointeurs de téléportation, procédé classique en réalité virtuelle, peut rendre visite à deux techniciens devant des moniteurs. Sur les écrans apparaît la salle de radiochirurgie et le Cyberknife, sous divers angles. « C’est une solution personnalisée, insiste Alain Toledano. La personne voit notre Cyberknife, dans notre environnement. Ce n’est comme si on lui passait un film qui serait le même pour tous. Il peut regarder à droite, à gauche, aller voir le robot, se balader dans la pièce. »

Modifier la représentation mentale

Jusque-là, la phase de préparation à la radiochirurgie passait par des images ou, plus technique, des courbes de suivi et de résultat du traitement. Ou encore des dessins anatomiques. « Mais la représentation mentale qu’en retirait le patient n’était pas terrible », admet l’oncologue. Le projet aide à rehausser le niveau de cette représentation.

En raison de la pandémie de Covid-19, Dassault Systèmes a mis un an et demi à développer l’expérience. « La plupart des fabricants de machines médicales font toute l’ingénierie de leurs appareils avec nos solutions, le design, la simulation, avant de les produire, note Frédéric Vacher. Depuis un certain temps, nous mettons en place des expériences autour des machines. » Jusque-là, les applications immersives conçues par Dassault Systèmes concernaient essentiellement des environnements industriels dangereux, pour former des personnels à des tâches délicates.

Si l’immersion est vécue par le patient à la clinique, elle est techniquement hébergée sur la plateforme cloud de Dassault Systèmes. Donc potentiellement accessible de n’importe où dans le monde. Mais pour l’équipe médicale, il reste important de venir sur place, pour rencontrer le personnel, poser des questions, repérer les lieux réels. Le virtuel a tout de même ses limites.

Source: Sciencesetavenir.fr
laissez un commentaire