Notre système immunitaire ne serait pas adapté à une rencontre avec les extraterrestres

La découverte d’eau liquide sur certains corps planétaires serait un indice que la Terre n’est pas la seule à abriter la vie. Mais si des micro-organismes venus de loin parvenaient jusqu’à nous, serions-nous immunisés ?

Astronaute sur Mars

La potentielle présence d’eau liquide sur Mars pourrait indiquer qu’elle abriterait des micro-organismes vivants, dont l’effet sur l’humain reste à déterminer.

NASA/JPL-CALTECH

Poser pied sur une autre planète que la Terre. Voilà le projet, à terme, qui fait rêver astronomes et entrepreneurs. Alors que les recherches se multiplient dans la quête d’une planète qui puisse abriter la vie sous quelconque forme, Europa, lune de Jupiter, et Encelade, lune de Saturne, offrent déjà des pistes intéressantes. Ces satellites pourraient en effet satisfaire l’une des conditions essentielles au développement de la vie grâce à la présence, encore sous investigation, d’eau liquide à leur surface. Celle-ci se cacherait également sous la surface de Mars, la voisine sur laquelle l’humain a l’ambition de se rendre. Avant cependant qu’une telle avancée prenne place, la Nasa et des entreprises d’exploration de l’espace telles que SpaceX, Virgin Galactic ou Blue Origin encouragent le développement de voyages commerciaux spatiaux et l’exploration d’autres planètes, accompagnés de l’envoi de sondes à longue portée pour récupérer des échantillons. S’il y a bien de l’eau ailleurs que sur la Terre, la vie aura très certainement suivi. Et si, dans des échantillons, cette vie était accidentellement introduite sur Terre ? C’est la question que se sont posés des scientifiques britanniques, auteurs d’une étude publiée dans la revue Microorganisms.

De la vie extraterrestre rapportée sur Terre

La vie telle que nous la connaissons nécessite la présence et la disponibilité d’eau sous forme liquide. Les corps célestes en dehors de la Terre qui ont ou peuvent avoir accueilli un environnement aqueux font l’objet d’une attention particulière dans le cadre de la recherche de vie extraterrestre. Les vallées fluviales asséchées de Mars attestent de son histoire océanique passée, et de l’eau liquide est encore susceptible d’exister sur les calottes polaires martiennes ou sous sa surface. D’après les observations de la mission Cassini et les images du télescope Hubble, de grands océans d’eau liquide existeraient également sous les calottes glaciaires de la lune de Jupiter Europa, ainsi que celle de Saturne, Encelade. Le nombre de planètes semblables à la Terre tournant autour d’étoiles semblables au Soleil dans notre galaxie est estimé à plus de six milliards et des signatures spectroscopiques de vapeur d’eau ont été signalées dans l’atmosphère de nombre d’exoplanètes, dont K2-18b.

Les missions spatiales telles que Mars 2020 recherchent des preuves de l’existence d’une « exovie » là où il est possible qu’il y ait de l’eau, et peuvent tenter de récupérer des échantillons de planètes ou de lunes où la vie pourrait exister. De telles expéditions pourraient contaminer les « exo-environnements » avec des microorganismes terrestres, bactéries ou virus, qui auraient temporairement survécu aux conditions difficiles imposées par le transport spatial, comme de la radiation, le vide, les températures extrêmement variables, etc. L’inverse est toutefois également envisageable : serait-il possible que des microorganismes non terrestres qui pourraient avoir évolué dans des environnements aqueux puissent interagir avec les humains et d’autres animaux à leur arrivée sur Terre ? Cela pose la question des risques en matière de biosécurité et des problèmes de contamination de l’écosystème terrestre, voire d’infection par des ex-microorganismes. « Le monde n’est que trop conscient du défi immunitaire posé par l’émergence de tout nouveaux pathogènes« , a déclaré le professeur Neil Gow, vice-chancelier adjoint de l’université d’Exeter qui a mené l’étude, en décrivant l’essence du projet : « Dans le cadre d’une expérience de réflexion, nous nous sommes demandés ce qui se passerait si nous étions exposés à un micro-organisme prélevé sur une autre planète ou lune où la vie a évolué« .

L’image de gauche montre une région de la croûte terrestre d’Europe composée de blocs qui se seraient détachés et auraient « flotté » dans de nouvelles positions. Ces caractéristiques constituent la meilleure preuve géologique à ce jour qu’Europa a pu avoir un océan de sous la surface à un moment donné de son histoire. La présence d’un champ magnétique conduit les scientifiques à penser qu’un océan est très probablement présent sur Europa aujourd’hui. 

Les acides aminés, briques du vivant

« Certains éléments organiques très inhabituels existent en dehors de la planète Terre, et pourraient être utilisés pour constituer les cellules de ces microbes extraterrestres« , introduit Neil Gow. « Notre système immunitaire serait-il capable de détecter les protéines fabriquées à partir de ces éléments constitutifs non terrestres si de tels organismes étaient découverts et ramenés sur Terre puis s’échappaient accidentellement ? Nous avons émis l’hypothèse que les formes de vie qui ont évolué dans un environnement de différents acides aminés pourraient les contenir dans leur structure« . Pour simuler cette hypothèse, les scientifiques ont synthétisé in vitro des peptides, des chaines d’acides aminés, rares sur Terre, et ont ensuite examiné la capacité de ces peptides à activer et induire l’action des lymphocytes T, des cellules immunitaires, chez des souris, dont le système immunitaire est très semblable au nôtre. « La vie sur Terre repose sur 22 acides aminés essentiels« , explique l’auteur principal, le Dr Katja Schaefer, de l’Université d’Exeter, qui ajoute : « nous avons synthétisé chimiquement des « exo-peptides » contenant des acides aminés rares sur Terre, et avons testé si le système immunitaire d’un mammifère pouvait les détecter« . 

« Le contact avec des microorganismes extraterrestres pourrait présenter un risque immunologique »

Pour synthétiser les « exo-peptides », les chercheurs se sont basés sur des restes de météorite. En effet, les chondrites, des météorites pierreuses, contiennent jusqu’à 5% de carbone, principalement inorganique, et une forte proportion de composés organiques. Un certain nombre d’acides aminés, de polyols, de sucres, d’alcools de sucre et d’acides de sucre ont été retrouvés sur des chondrites carbonées, notamment la météorite de Murchison tombée en Australie en 1969, qui contenait plus de 100 acides aminés parmi des milliers de molécules organiques composées de deux à neuf atomes de carbone. Parmi les acides aminés les plus communs dans les météorites, l’isovaline et l’acide α-aminoisobutyrique ont été incorporés dans des peptides et soumis au système immunitaire des souris. « Notre enquête a montré que ces « exo-peptides » étaient toujours traités, et que les lymphocytes T étaient toujours activés, mais que ces réponses étaient moins efficaces que pour les peptides terrestres « ordinaires« .

En effet, les lymphocytes T ne sont activés qu’à 15% lors de l’entrée du peptide contenant de l’isovaline et à 61% quand le peptide contient de l’acide α-aminoisobutyrique. Pour des peptides constitués d’acides aminés naturellement abondants sur Terre, ces taux s’élèvent à 82% et 91% respectivement. « Nous supposons donc que le contact avec des microorganismes extraterrestres pourrait présenter un risque immunologique pour les missions spatiales visant à récupérer des organismes sur des exoplanètes et des lunes » conclut Dr Katja Schaefer. Bien qu’il ait été démontré que les astronautes sont capables de survivre en bonne santé après de nombreux mois dans l’espace, des recherches ont prouvé que les vols spatiaux peuvent progressivement affaiblir les réponses immunitaires. Les effets de l’exposition à un nouveau microbe, absent sur Terre, pourraient ainsi être exacerbés chez les astronautes dont le corps et le système immunitaire ont déjà été exposés à des conditions extrêmes et à un stress environnemental soutenu.

La chondrite carbonée de Murchison, dont environ 100 kg sont tombés en Australie en 1969, contenait une centaine d’éléments organiques © MARK A SEPHTON

 

Il n’est pas encore certain qu’un micro-organisme extraterrestre adapté à un environnement non terrestre extrême puisse être pathogène pour un hôte humain. De même, il est probable qu’un tel organisme soit si mal adapté aux conditions du corps humain que sa capacité à nous coloniser et à nous infecter soit limitée. Toutefois, même si le potentiel pathogène des microorganismes était intrinsèquement atténué, il reste possible qu’ils puissent induire des réactions allergiques ou créer de nouveaux composés toxinogènes. Ainsi, dans l’hypothèse où la vie microbienne serait découverte en dehors de la Terre, et dont le contenu protéique des cellules inclurait des molécules organiques rares trouvées dans les météorites, un défi immunologique se poserait aux humains et aux autres animaux. Les explorations spatiales qui visent à prélever des échantillons dans les milieux aqueux de notre système solaire se doivent donc de reconnaître et d’atténuer, comme le recommandent les chercheurs, les éventuelles menaces immunologiques posées par une exposition accidentelle à de nouveaux « exo-microorganismes ».

Poser pied sur une autre planète que la Terre. Voilà le projet, à terme, qui fait rêver astronomes et entrepreneurs. Alors que les recherches se multiplient dans la quête d’une planète qui puisse abriter la vie sous quelconque forme, Europa, lune de Jupiter, et Encelade, lune de Saturne, offrent déjà des pistes intéressantes. Ces satellites pourraient en effet satisfaire l’une des conditions essentielles au développement de la vie grâce à la présence, encore sous investigation, d’eau liquide à leur surface. Celle-ci se cacherait également sous la surface de Mars, la voisine sur laquelle l’humain a l’ambition de se rendre. Avant cependant qu’une telle avancée prenne place, la Nasa et des entreprises d’exploration de l’espace telles que SpaceX, Virgin Galactic ou Blue Origin encouragent le développement de voyages commerciaux spatiaux et l’exploration d’autres planètes, accompagnés de l’envoi de sondes à longue portée pour récupérer des échantillons. S’il y a bien de l’eau ailleurs que sur la Terre, la vie aura très certainement suivi. Et si, dans des échantillons, cette vie était accidentellement introduite sur Terre ? C’est la question que se sont posés des scientifiques britanniques, auteurs d’une étude publiée dans la revue Microorganisms.

De la vie extraterrestre rapportée sur Terre

La vie telle que nous la connaissons nécessite la présence et la disponibilité d’eau sous forme liquide. Les corps célestes en dehors de la Terre qui ont ou peuvent avoir accueilli un environnement aqueux font l’objet d’une attention particulière dans le cadre de la recherche de vie extraterrestre. Les vallées fluviales asséchées de Mars attestent de son histoire océanique passée, et de l’eau liquide est encore susceptible d’exister sur les calottes polaires martiennes ou sous sa surface. D’après les observations de la mission Cassini et les images du télescope Hubble, de grands océans d’eau liquide existeraient également sous les calottes glaciaires de la lune de Jupiter Europa, ainsi que celle de Saturne, Encelade. Le nombre de planètes semblables à la Terre tournant autour d’étoiles semblables au Soleil dans notre galaxie est estimé à plus de six milliards et des signatures spectroscopiques de vapeur d’eau ont été signalées dans l’atmosphère de nombre d’exoplanètes, dont K2-18b.

Les missions spatiales telles que Mars 2020 recherchent des preuves de l’existence d’une « exovie » là où il est possible qu’il y ait de l’eau, et peuvent tenter de récupérer des échantillons de planètes ou de lunes où la vie pourrait exister. De telles expéditions pourraient contaminer les « exo-environnements » avec des microorganismes terrestres, bactéries ou virus, qui auraient temporairement survécu aux conditions difficiles imposées par le transport spatial, comme de la radiation, le vide, les températures extrêmement variables, etc. L’inverse est toutefois également envisageable : serait-il possible que des microorganismes non terrestres qui pourraient avoir évolué dans des environnements aqueux puissent interagir avec les humains et d’autres animaux à leur arrivée sur Terre ? Cela pose la question des risques en matière de biosécurité et des problèmes de contamination de l’écosystème terrestre, voire d’infection par des ex-microorganismes. « Le monde n’est que trop conscient du défi immunitaire posé par l’émergence de tout nouveaux pathogènes« , a déclaré le professeur Neil Gow, vice-chancelier adjoint de l’université d’Exeter qui a mené l’étude, en décrivant l’essence du projet : « Dans le cadre d’une expérience de réflexion, nous nous sommes demandés ce qui se passerait si nous étions exposés à un micro-organisme prélevé sur une autre planète ou lune où la vie a évolué« .

Source: Sciencesetavenir.fr
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