Espérance de vie : depuis la chute du mur de Berlin, l’Allemagne de l’Est a-t-elle rattrapé son retard sur l’Ouest ?

Au moment de la réunification des deux Allemagne en 1990, l’espérance de vie était plus faible de trois ans pour les habitants de l’Est que pour ceux de l’Ouest. Qu’en est-il aujourd’hui ?

Allemagne de l'Est et de l'Ouest : même espérance de vie ?

Une même partie du mur de Berlin (côté est) en janvier 1990 (à gauche) et en octobre 2014 (à droite).

© Eberhard Klöppel;Lukas Schulze / DPA

De 1949 à 1989, Allemagne de l’Est et Allemagne de l’Ouest ont vécu séparément. Une même population dirigée par deux systèmes politiques complètement différents pendant des dizaines d’années, avant d’être de nouveau réunie. Un cas unique dans l’Histoire… qui a eu un effet sur l’espérance de vie des habitants ? C’est la question à laquelle ont répondu en 2017 des chercheurs de l’Institut national d’études démographiques (Ined). Des travaux à (re)découvrir dans l’article ci-dessous à l’occasion des 31 ans de la chute du mur de Berlin, le 9 novembre 2020.

Les maladies cardiovasculaires en cause

Malgré ce que l’on pourrait croire, bien que l’Allemagne de l’Ouest ait connu un développement du système de santé plus favorable que son voisin, les espérances de vie des deux parties n’ont commencé à diverger qu’au milieu des années 1970 (voir graphique ci-dessous). L’écart se creuse pour une raison majeure : la mortalité liée aux maladies cardiovasculaires et aux accidents vasculaires cérébraux (AVC) baisse plus rapidement à l’Ouest qu’à l’Est, privé des techniques médicales modernes.

© M. Pechholdoova, Ined

La réunification, un choc d’abord négatif sur l’espérance de vie !

C’est au moment de la réunification, en 1990, que l’écart d’espérance de vie est à son maximum : 3,4 ans pour les hommes et 2,8 ans pour les femmes. La raison avancée par les chercheurs n’est autre que… le « choc » provoqué par la réunification ! « La chute du régime communiste a brusquement désorganisé les règles de la vie sociale libérant certains comportements dangereux pour la santé (alcoolisme, conduite imprudente sur la route, etc.) dont le développement a aussi été une réponse au stress du passage à l’économie de marché », expliquent les chercheurs. Toutefois, le poids de ces comportements pèse peu sur la mortalité par rapport à celui des maladies cardiovasculaires et AVC. Une fois ce « choc » passé, le rattrapage de l’Allemagne de l’Est en termes d’espérance de vie sur son voisin est tout bonnement spectaculaire. Le recours soudain aux techniques modernes d’intervention médicale (chirurgie cardiaque non invasive, médications performantes, unités d’intervention d’urgence) a permis de diminuer brutalement la mortalité liée aux pathologies cardiaques. 

L’écart d’espérance de vie entre les deux Allemagne se réduit au fur et à mesure, et en 2013, la différence n’est plus que d’1,3 an chez les hommes et a presque disparu chez les femmes (0,17 an). Si le retard n’est pas totalement comblé, surtout chez les hommes, c’est parce que ces derniers « paient pour leurs parents », en quelque sorte. « Ils continuent de pâtir d’un reliquat de sur-risques liés aux déficiences de l’ancien régime en matière de maladies cardiovasculaires et de maladies de société (alcoolisme, tabagisme, morts violentes, comportements propices aux maladies du cœur) », avancent les chercheurs. L’amélioration du système de santé n’est donc pas suffisante pour que les ex-Allemands de l’Est comblent définitivement leur retard : cette étude montre que les comportements individuels et le style de vie sont également majeurs pour améliorer l’espérance de vie des générations futures.

Source: Sciencesetavenir.fr
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