Enfin la preuve indiscutable que Néandertal enterrait ses morts

La redécouverte des restes fossiles d’un Néandertalien de deux ans, trouvés dans les années 1970 sous l’abri de la Ferrassie, en Dordogne, apporte enfin la confirmation définitive que cette espèce disparue du genre Homo offrait à ses défunts, à l’instar d’Homo sapiens, des sépultures. 

Neandertal enterrait bien ses morts

Reconstitution d’une scène d’inhumation à la Ferrassie.

E. Roudier

Nous en sommes désormais certains : Néandertal enterrait bien ses défunts. Si la plupart des archéologues considéraient cette pratique chez les membres de cette espèce éteinte comme une évidence, certains irréductibles, « détracteurs poussés à l’extrême », refusaient « par principe la possibilité d’une sépulture », regrette Antoine Balzeau. Mais ce paléoanthropologue au laboratoire Histoire naturelle de l’homme préhistorique (CNRS/Muséum national d’histoire naturelle) vient de clore le débat une bonne fois pour toutes. Lui et son équipe sont parvenus à démontrer qu’un enfant néandertalien de deux ans avait bien été inhumé par les siens, il y a 41.000 ans, sur le célèbre site de la Ferrassie, en Dordogne. Leur étude est publiée dans la revue Scientific Reports le 9 décembre 2020.

Une polémique enfin close  

« Il y a toujours cette réticence manifestée par certains dès que l’on parle des comportements des Hommes préhistoriques. Nous pourrions finalement classer les chercheurs en trois groupes, dont deux à l’extrême. Le premier affirmant sans cesse que seul Homo sapiens a été capable d’enterrer ses morts ou de faire de l’art, le second clamant qu’entre Néandertal et l’Homme moderne, il n’y a aucune différence. Ce sont deux visions biaisées qui consistent à extrapoler. Heureusement, un troisième groupe, majoritaire, est plus modéré. » Il est toutefois vrai que les fouilles qui ont révélé la plupart des squelettes les mieux conservés, menées au début du 20 siècle, ne s’appuyaient pas encore sur les standards de qualité aujourd’hui en vigueur. De fait, il était jusqu’ici difficile d’établir avec certitude que ces mêmes squelettes avait bien été enfouis volontairement plutôt que recouverts naturellement par la terre avec le temps.

Antoine Balzeau et Asier Gómez-Olivencia, de l’Université du Pays basque, en Espagne, se sont décidés à reconstituer et à réinterpréter la distribution spatiale de ces restes humains arrachés à leur lieu de repos éternel il y a plus de 100 ans. En fouillant dans les collections inexploitées du Musée d’archéologie nationale de Saint-germain-en-Laye, ils sont ainsi tombés sur un intriguant petit squelette humain en provenance de l’abri sous roche de La Ferrassie, trouvé cette fois dans les années 1970.

Des preuves jamais exploitées depuis 1973

En 1974, la France s’apprête à accueillir un congrès international de paléoanthropologie sur ce site néandertalien qui compte parmi les plus célèbres du pays. « Mais ce dernier était en friche. C’est pourquoi des fouilles ont été menées en 1970 et 1973 pour ‘faire un coup de propre’ plus que pour de la recherche », explique Antoine Balzeau. « Quatre jours avant la fin de la fouille, les chercheurs sur place ont trouvé un squelette d’enfant dans une couche sédimentaire stérile, telle une poche fossile apparue comme par magie. Mais ils n’ont pas réalisé ce sur quoi il venait de mettre la main. » Leur trouvaille était pourtant capitale : parce que ces petits ossements reposaient à un niveau totalement vide, vierge de tout autres ossements animaux ou humains, ils détenaient là la preuve que des Hommes, il y plus de 40 millénaires, avait sans doute creusé un trou pour y déposer leur jeune défunt.

L’équipe d’Antoine Balzeau et Asier Gómez-Olivencia a ainsi analysé de manière poussée les ossements : état de conservation, étude des protéines, génétique, datation au carbone 14… Ils sont arrivés à la conclusion que l’enfant, décédé il y 41.000 ans, avait été enterré dans une couche sédimentaire vieille de 60.000 ans. Il y reposait la tête inclinée vers l’ouest, alors que les autres couches stratigraphiques du site sont inclinées vers le nord-est. La tête était aussi plus haute que le bassin, autrement dit comme positionnée sur un petit « oreiller » de terre. L’état de conservation des os indique par ailleurs un enfouissement rapide après la mort.

« Notre objectif était d’avoir une approche robuste sur des données de terrain, sans que l’on ne puisse discuter du fait que ces Hommes avaient bel et bien été enterrés. C’est chose faite », se réjouit Antoine Balzeau.

Source: Sciencesetavenir.fr
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