Ce qu’il se passe dans notre cerveau quand on explore quelque chose de nouveau

Changer de trajet, tester un nouveau menu… L’exploration entraîne une augmentation forte de l’attention, selon des signatures cérébrales et corporelles intenses. C’est ce processus qui semble affecté chez les personnes atteintes de troubles obsessionnels compulsifs (TOC).

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Chaque fois que nous testons volontairement quelque chose de nouveau, notre cerveau réagit d’une façon particulière.

FANATIC STUDIO / GARY WATERS / S / FST / Science Photo Library via AFP

Et si vous commandiez à manger dans un nouveau restaurant ce soir ? Cette décision n’a l’air de rien, mais pour votre cerveau, elle implique des processus très spécifiques, détaillent de nouveaux travaux dans la revue eLife. Retard de battement cardiaque, dilatation pupillaire, ondes cérébrales spécifiques et baisse de confiance dans nos choix, l’exploration oblige notre cerveau à porter une attention nettement plus intense à notre environnement qu’à l’accoutumée. 

Cœur, pupilles, cerveau : le corps réagit à l’exploration d’une nouveauté 

Imaginez que vous êtes en voiture, où vous hésitez à changer votre trajet de retour du travail pour tester la baguette « tradition » d’une nouvelle boulangerie. Vous êtes alors en plein « dilemme exploration-exploitation », où « l’exploitation » de votre boulangerie habituelle vous donnera un pain de qualité connue et un trafic prévisible, tandis que l’exploration vers une nouvelle échoppe ne vous réserve que des inconnues – positives ou négatives. Tablant sur une belle surprise, vous êtes sur le point d’opter pour l’exploration. Quelques secondes avant que la décision ne soit prise, votre cerveau supprime les ondes alpha de votre système visuel, un effet caractéristique d’une attention soutenue, explique à Sciences et Avenir Valentin Wyart, qui a dirigé ces travaux. Puis, au moment où vous pincez le quignon de votre nouvelle baguette, votre cerveau est en éveil : avez-vous fait le bon choix ? La fréquence de votre cœur ralentit légèrement, avec comme un retard dans son battement. Vos pupilles se dilatent, signe indirect que votre cerveau a probablement activé votre système noradrénergique. Ce dernier est notamment localisé dans le locus ceruleus, zone cérébrale qui relâche la noradrénaline, une neuro-hormone impliquée dans l’attention.  

Différencier la signature de l’exploration de celle du changement de comportement qui en découle 

Ces découvertes, l’équipe les a faites en laboratoire, grâce à une méthodologie innovante et minutieusement calibrée.

Et si vous commandiez à manger dans un nouveau restaurant ce soir ? Cette décision n’a l’air de rien, mais pour votre cerveau, elle implique des processus très spécifiques, détaillent de nouveaux travaux dans la revue eLife. Retard de battement cardiaque, dilatation pupillaire, ondes cérébrales spécifiques et baisse de confiance dans nos choix, l’exploration oblige notre cerveau à porter une attention nettement plus intense à notre environnement qu’à l’accoutumée. 

Cœur, pupilles, cerveau : le corps réagit à l’exploration d’une nouveauté 

Imaginez que vous êtes en voiture, où vous hésitez à changer votre trajet de retour du travail pour tester la baguette « tradition » d’une nouvelle boulangerie. Vous êtes alors en plein « dilemme exploration-exploitation », où « l’exploitation » de votre boulangerie habituelle vous donnera un pain de qualité connue et un trafic prévisible, tandis que l’exploration vers une nouvelle échoppe ne vous réserve que des inconnues – positives ou négatives. Tablant sur une belle surprise, vous êtes sur le point d’opter pour l’exploration. Quelques secondes avant que la décision ne soit prise, votre cerveau supprime les ondes alpha de votre système visuel, un effet caractéristique d’une attention soutenue, explique à Sciences et Avenir Valentin Wyart, qui a dirigé ces travaux. Puis, au moment où vous pincez le quignon de votre nouvelle baguette, votre cerveau est en éveil : avez-vous fait le bon choix ? La fréquence de votre cœur ralentit légèrement, avec comme un retard dans son battement. Vos pupilles se dilatent, signe indirect que votre cerveau a probablement activé votre système noradrénergique. Ce dernier est notamment localisé dans le locus ceruleus, zone cérébrale qui relâche la noradrénaline, une neuro-hormone impliquée dans l’attention.  

Différencier la signature de l’exploration de celle du changement de comportement qui en découle 

Ces découvertes, l’équipe les a faites en laboratoire, grâce à une méthodologie innovante et minutieusement calibrée. Car jusqu’à présent, les études portant sur l’exploration comportaient un biais majeur. “Le problème, c’est que le moment où les gens explorent coïncide souvent avec le moment où ils changent effectivement de comportement”, explique Valentin Wyart. Il faut donc discriminer ce qui dans le cerveau signe la volonté d’exploration (la décision de changer de boulangerie) et ce qui découle uniquement du changement de comportement causé par votre décision (un nouveau trajet en voiture par exemple). Valentin Wyart illustre la différence d’un exemple. « Imaginez que vous conduisez dans le brouillard, lorsque soudain, vous apercevez un obstacle devant vous. Vous devez alors changer de trajectoire. Mais vous n’avez fait que réagir à votre environnement, vous n’avez pas eu la volonté de l’explorer. »

L’exploration provoque des signaux d’attention intense

Cette volonté, ou plutôt le contrôle du choix d’explorer ou non le monde qui nous entoure et que les chercheurs nomment « agentivité », c’est précisément ce qu’ils souhaitaient observer. Pour cela, deux paquets de cartes contenant chacun des proportions différentes de cartes oranges ou bleues sont proposés à deux groupes de sujets. Les sujets connaissent la composition des deux paquets, mais ils ne peuvent pas les discerner l’un de l’autre. Dans le premier jeu, c’est un expérimentateur qui tire des cartes, et à chaque tirage le sujet doit deviner de quel paquet la carte a été tirée : c’est un jeu sans « agentivité », les sujets ne peuvent qu’observer. Dans le second jeu, c’est le sujet qui tire chaque carte en appuyant sur un bouton, et le sujet doit deviner de quel paquet vient la carte. C’est là qu’intervient l’exploration.

« Dans ce second jeu, le sujet contrôle le paquet dont il tire les cartes, c’est la seule différence entre les deux conditions« , confirme Valentin Wyart. C’est en enregistrant leurs ondes cérébrales, le diamètre de leurs pupilles et leur fréquence cardiaque que son équipe et lui sont parvenus à déterminer la séquence des événements qui accompagnent la volonté d’exploration. Fait intéressant, cette signature de l’exploration est similaire à celle qui découle des changements de comportement, mais en « beaucoup plus marquée« , précise le chercheur, signal d’une attention intense. 

Chute de confiance et obstination 

Deux paramètres sont cependant uniquement caractéristiques de l’exploration. D’abord, la confiance que les sujets ont dans leur choix chute drastiquement au moment d’explorer. « Les sujets ne savent pas encore s’ils ont bien fait de changer de stratégie, et leur confiance met du temps à remonter à leur niveau initial« , précise Valentin Wyart. Paradoxalement en revanche, seule l’exploration conduit les sujets à persister dans leur nouvelle stratégie. « Si dans votre voiture dans le brouillard, vous vous apercevez finalement que vous vous êtes trompé et qu’il n’y a pas d’obstacle, alors vous n’aurez aucun mal à reprendre votre ancienne trajectoire« , illustre le chercheur. En revanche, même si le pain n’est pas forcément plus croustillant dans votre nouvelle boulangerie, vous serez plus susceptible de continuer à y aller. « Nous avons besoin d’insister et de tester notre nouvelle stratégie, même si elle ne fonctionne initialement pas très bien et que ce n’est pas optimal d’un point de vue statistique. »

Une obstination qui fait fortement penser au fameux biais de confirmation, qui conduit notre cerveau à intégrer les informations qu’il croit déjà vraies. Même bébés, nous avons une propension à développer une préférence pour un choix uniquement après qu’il a été fait, comme pour justifier un choix à la base peu motivé. Pour Valentin Wyart, il est possible que le biais de confirmation soit effectivement impliqué dans le processus d’exploration – mais il faudra le vérifier lors de recherches ultérieures. 

Dans les troubles obsessionnels compulsifs (TOC), l’exploration pourrait être défaillante 

Plus concrètement, ces résultats ne nous renseignent pas seulement sur le fonctionnement normal du cerveau, mais aussi sur son potentiel fonctionnement pathologique. “Nous avons récemment testé les mêmes jeux sur des patients atteints de troubles obsessionnels compulsifs (TOC)”, révèle Valentin Wyart. « On attribue souvent aux patients souffrant de TOC des difficultés à prendre une décision sous incertitude, on parle historiquement de ‘folie du doute’. » Pourtant, leurs résultats préliminaires suggèrent que les patients réalisent le jeu aussi bien que les autres dans la situation d’observation, et que c’est uniquement dans la situation d’exploration que des difficultés apparaissent. Si cela se confirme, le problème ne serait donc pas l’incertitude, mais la capacité à explorer. « Ces premiers résultats, qui doivent être confirmés, pourraient permettre de mieux comprendre ces pathologies, et à terme peut-être de contribuer à améliorer le diagnostic et le suivi des patients« , conclut le scientifique, prévoyant la publication de ces résultats courant 2023. 

Source: Sciencesetavenir.fr
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