Anémie spatiale : les conséquences des voyages dans l’espace sur les globules rouges des astronautes

Dans un contexte où l’humanité s’aventure de plus en plus dans l’espace, la compréhension de l’anémie que ces voyages entraînent est un enjeu critique. Une nouvelle étude apporte une avancée considérable dans ce sens.

Anémie spatiale

L’anémie spatiale a été constatée chez les astronautes depuis les premières missions dans l’espace, mais les mécanismes qui y contribuent restent flous.

Nibras Shahin

Depuis les premières missions spatiales envoyant des êtres humains dans l’espace, un phénomène médical a été constaté chez les astronautes à leur retour sur Terre : l’anémie spatiale, qui consiste en une forte diminution du taux de globules rouges en circulation dans le sang des astronautes pendant leur mission hors de la planète.

La plupart des études portant sur le sujet de l’anémie spatiale basent leur analyse sur des données récoltées uniquement avant et après les missions des astronautes. L’une des rares études ayant également pris en compte des données mesurées pendant le temps des astronautes dans l’espace, publiée en 2017 dans la revue BMC Hematology et menée entre autres par des scientifiques de la NASA, semblait indiquer que l’anémie spatiale ne serait pas particulièrement persistante sur des missions de longue durée. 

Nouvelle méthodologie

Récemment, une nouvelle étude a été menée par des chercheurs de l’Université d’Ottawa (Canada) en abordant la méthodologie d’analyse autrement : alors que l’étude de la NASA en 2017 reposait uniquement sur des prélèvements sanguins effectués avant, après et pendant la mission (renvoyés sur Terre et analysés dans les 48 heures suivant le prélèvement), cette récente étude publiée dans la revue Nature Medicine combine l’analyse sanguine à celle d’échantillons de l’air expiré par les astronautes. Leur étude a porté sur 14 astronautes étant restés six mois à bord de la Station spatiale internationale (ISS).

Depuis les premières missions spatiales envoyant des êtres humains dans l’espace, un phénomène médical a été constaté chez les astronautes à leur retour sur Terre : l’anémie spatiale, qui consiste en une forte diminution du taux de globules rouges en circulation dans le sang des astronautes pendant leur mission hors de la planète.

L’anémie est définie comme un taux anormalement bas d’hémoglobine dans le sang. L’hémoglobine, protéine contenue dans les globules rouges, est essentielle au transport du dioxygène dans le corps. Comme l’indique l’Organisation mondiale de la santé (OMS), les symptômes qui se manifestent en conséquence sont principalement de la fatigue, une faiblesse générale, des vertiges et de l’essoufflement fréquent. 

La plupart des études portant sur le sujet de l’anémie spatiale basent leur analyse sur des données récoltées uniquement avant et après les missions des astronautes. L’une des rares études ayant également pris en compte des données mesurées pendant le temps des astronautes dans l’espace, publiée en 2017 dans la revue BMC Hematology et menée entre autres par des scientifiques de la NASA, semblait indiquer que l’anémie spatiale ne serait pas particulièrement persistante sur des missions de longue durée. 

Nouvelle méthodologie

Récemment, une nouvelle étude a été menée par des chercheurs de l’Université d’Ottawa (Canada) en abordant la méthodologie d’analyse autrement : alors que l’étude de la NASA en 2017 reposait uniquement sur des prélèvements sanguins effectués avant, après et pendant la mission (renvoyés sur Terre et analysés dans les 48 heures suivant le prélèvement), cette récente étude publiée dans la revue Nature Medicine combine l’analyse sanguine à celle d’échantillons de l’air expiré par les astronautes. Leur étude a porté sur 14 astronautes étant restés six mois à bord de la Station spatiale internationale (ISS).


L’astronaute Jeff Williams qui collecte un échantillon d’air expiré dans le cadre de l’étude en question, à bord de l’ISS. (Crédits : NASA)

Les scientifiques ont analysé ces échantillons “respiratoires” en mesurant la quantité de monoxyde de carbone (CO) contenu dedans. En effet, une molécule de CO est produite à chaque fois qu’une molécule d’hème (un composant de l’hémoglobine) est détruite.

Dégradation des globules rouges

Les hématies, qu’on appelle communément globules rouges, font partie des cellules normalement présentes dans le sang. Riches en hémoglobines, elles assurent le transport de l’oxygène dans les tissus du corps et sont fabriquées dans la moelle osseuse (on parle également de moelle hématopoïétique, qui est en charge de la production des cellules sanguines). Les globules rouges ont une durée de vie d’environ 120 jours et sont, comme toutes nos cellules, continuellement renouvelés (chaque type de cellule se renouvelle à un rythme différent).

Il est estimé que 1% de nos globules rouges sont renouvelés chaque jour, ce qui équivaut à environ deux millions d’entre eux par seconde. Autrement dit 1% de ces cellules sanguines sont dégradées et une quantité égale est produite. Or, d’après les résultats de l’étude canadienne, les astronautes détruiraient 54% de globules rouges supplémentaires, soit environ trois millions par seconde.

Conséquences au retour sur Terre

Le Dr. Guy Trudel, professeur à l’Université d’Ottawa et l’un des auteurs de l’étude en question, explique que “heureusement, avoir moins de globules rouges dans l’espace n’est pas un problème quand le corps est en apesanteur.” En revanche, “les effets de l’anémie se font sentir lorsque la gravité entre à nouveau en jeu, que ce soit sur Terre ou potentiellement une autre planète ou lune.” Cela inclut des impacts sur “l’énergie, l’endurance, la force, et peut menacer les objectifs de la mission.”

À leur retour sur Terre, 5 des astronautes étaient “cliniquement anémiés”. Cette anémie est apparemment réversible, le taux de globules rouges revenant progressivement à la normale au cours des trois ou quatre mois suivant l’atterrissage.

En revanche, un an plus tard, le taux de dégradation de globules rouges des astronautes était toujours 30% plus élevé qu’avant leur départ pour l’ISS. Pour cette raison, les chercheurs estiment que de potentiels “changements structurels” auraient pu avoir lieu durant leur séjour dans l’espace. L’anémie spatiale pourrait donc avoir un impact significatif sur les missions spatiales de longue durée, d’autant plus que d’après le Dr. Trudel, plus les missions sont longues, plus l’anémie provoquée est importante.

Un enjeu de santé à prendre en compte

Les chercheurs insistent sur l’importance de procéder à un “dépistage des problèmes sanguins ou de santé liés à l’anémie, chez les astronautes et les touristes spatiaux,” ainsi qu’un examen médical à leur retour, d’autant plus que cette dernière catégorie de voyageurs s’annonce en expansion dans les années à venir.

On ne sait pour l’instant pas dans quelle mesure le corps humain peut supporter ce changement important dans le rythme de renouvellement des globules rouges, et d’autres études sont nécessaires pour pleinement mesurer l’ampleur de ce phénomène et le comprendre. 

Source: Sciencesetavenir.fr
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